Rambert Eugène – Les Alpes suisses (3ème série) : La troisième série des Alpes suisses, publiée en 1869, commence par le récit d’une course à Anzeindaz dans la neige fondante de février. L’auteur, en alpiniste aguerri, évoque les dangers, mais aussi les beautés féériques de la montagne en hiver, sans oublier sa flore et sa faune (fourmis, tétras). L’essai suivant est une remarquable petite étude de mœurs sur la vie culturelle d’un hameau de moyenne montagne en pays réformé. Rambert nous parle du «coterd», lieu de réunion et livre vivant grâce auquel les villageois se transmettent l’histoire orale de leur communauté. Quant aux ouvrages qui garnissent les étagères, Rambert en dénombre deux, également vénérables: d’une part, l’almanach du véritable Messager boiteux de Berne et Vevey, dont on conserve pieusement les numéros et que l’on annote de saison et saison, pour garder la trace de la vie campagnarde; de l’autre, la lourde et imposante Bible illustrée, qui sert de registre pour les grands évènements de la vie familiale et dans laquelle on puise les récits qui meublent les longues soirées d’hiver.
Dans Le Voyage d’un glacier, Rambert met ses talents de poète au service de la science pour décrire, non sans panache, l’imperceptible métamorphose des neiges éternelles en un «reptile effrayant et superbe qui […] fait craquer dans les gorges de la montagne ses anneaux monstrueux.» Ce «Voyage d’une goutte d’eau» présente de manière agréablement vulgarisée l’état des lieux des recherches en glaciologie autour de 1850. À notre époque où l’on parle beaucoup de réchauffement climatique, il est intéressant de se pencher sur ces études faites en pleine période d’expansion des glaciers.
Passant à l’historiographie officielle, Rambert revient sur le mythe des Alpes comme bastion de la liberté et de la souveraineté nationale. Pour examiner cette thèse, il compare la victoire de Morgarten contre les Habsbourg en 1315, qui scelle l’indépendance de l’ancienne Confédération, à la défaite de Rothenthurm contre l’armée révolutionnaire française en 1798, qui en consomme la chute. Il en conclut que ce n’est pas la topographie qui détermina l’issue de ces deux batailles, mais l’union, ou plutôt la désunion politique et sociale des cantons. La troisième série des Alpes suisses s’achève sur le savoureux portrait d’un autre incontournable symbole de l’imaginaire helvétique et romantique: Interlaken, étape obligée du Grand Tour et théâtre grandiose de la comédie humaine, où se décline le spectacle infiniment varié de l’admiration des touristes face à la sublime et austère Jungfrau.
Professeur de littérature française à l’École polytechnique de Zurich, poète, critique et humaniste pétri d’érudition scientifique, Eugène Rambert offre dans son encyclopédie alpine une contribution pittoresque à l’exploration d’un massif qui reste encore, à son époque, un monde à découvrir.
Téléchargements : ePUB – PDF – PDF A5 – Kindle-MOBI – HTML – DOC/ODT